·
introduction ·
I ·
II ·
III ·
IV ·
V · VI ·
VII ·
VIII ·
IX ·
X ·
XI ·
XII ·
conclusion ·
bibliographie ·

I - REGLEMENTER LES CROISEMENTS
1. le réglement de 1717
2. La surveillance les croisements
3. Le cas du Limousin
II - LA RECHERCHE DU CHEVAL TYPE
Claude Bourgelat
III - L'ADMINISTRATION DOIT-ELLE
CHOISIR L'ARABE OU L'ANGLAIS ?
1. Le plan de Préseau
de Dompierre
2. L'arabe ou l'anglais
3. La fin des haras
ANNEXES DU CHAPITRE V : LE CHEVAL
par Buffon
EXPLICATION DU TABLEAU GENEALOGIQUE
DU HARAS DE LA FRANCE
(notes)
CHAPITRE V - LES CRITERES DE L'ELEVE
L'intervention du pouvoir royal dans l'élevage
du cheval va s'accentuer au XVIIIe. En plus d'une administration
de plus en plus tatillonne sur les problèmes d'organisation
de la reproduction, un modèle idéal de cheval à
produire va être recherchée. L'administration de l'élevage
sélectionnera des étalons ayant des formes extérieures
particulières qui se veulent adaptées aux conditions
locales de reproduction. Elle élabore des critères
d'élevage et tente laborieusement de les imposer.
Négligé au début du siècle,
le cheval arabe devient peu à peu le modèle idéal.
En opposition avec cette quête administrative, une partie
de l'aristocratie qui répugne absolumment à la reprise
de l'élevage du cheval par l'administration royale, va chercher
outre-manche le cheval "nouveau" et "libéral" qui d'après
elle manque à la France. Le cheval anglais sera le modèle
anti-administratif accompli.
Après l'exposé des principales réglementations
du début du XVIIIe siècle, appaîtra progressivement
une théorisation esthétique par les hommes de cheval
en référence, ou contre, les critères administratifs.
Un débat s'amplifiera au XIXe siècle
entre les critères d'espèces de chevaux arabes et
anglais qui montre comment ce conflit va se cristalliser sur deux
conceptions de l'organisation sociale et de l'intervention de l'Etat.
I - REGLEMENTER
LES CROISEMENTS
Au début du XVIIIè siècle
les termes politiques de l'élevage sont reposés par
la mise en œuvre du règlement de 1717. La présentation
de ce règlement permet de détailler les dispositions
que le gouvernement royal essaye d'imposer avec les étalons
royaux ce qui le conduit à une surveillance accrue des pratiques.
Les tensions produites par ce volontarisme font réagir des
éleveurs nobles et souvent cavaliers émérites
dans les provinçes françaises. La recherche du beau et les nouvelles
connaissances scientifiques favorisent l'idéalisation de
certains types de chevaux mais surtout ouvre la voie à une
théorisation de la race comme seule susceptible de permettre
une organisation complète et unanimiste de l'élevage
français. Faut-il encore s'entendre sur les représentations
du beau ! y-a-t- il un cheval type ? Des théoriciens s'y
exerceront, souvent eux mêmes praticiens de l'art vétérinaire
et créateurs de la science vétérinaire.
1. Le réglement
de 1717
Le réglement de 1717 permet de se faire
une idée de l'importance que le gouvernement attachait à
la bonne organisation de l'organisation des Haras :
"Si l'on en juge par les
développements donnés aux moindres détails,
par le soin à ne rien laisser en oubli, à tout apprendre,
à tout exposer, à tout approfondir, à tout
raisonner, on peut supposer que les précautions prises et
les instructions données allaient à des intelligences
peu ouvertes et s'adressaient nécessairement à une
classe d'homme ignorante du cheval" (1).
Le règlement du 17
février 1717 est "un acte qui fixe la constitution même
des haras, puis un recueil d'ordonnances, de dispositions obligatoires,
et un résumé systématique des principes de
la science selon les idées du temps" (2)
Un mémoire du "Conseil du Dedans du Royaume"
accompagne ce règlement. Il précise aux intendants
et commissaires se trouvant dans les provinces que le règlement
explique "les intentions du Roy pour les mettre en estat de remplir
tout ce que Sa Majesté attendait en cela de leur ministère".
Les intendants des provinces ont mission de mettre
en oeuvre la nouvelle politique d'élevage que le mémoire
justifie ainsi : " l'épuisement des chevaux dans lequel les
dernières guerres ont mis la France, et la nécessité
d'y faire renaître l'abondance tant pour l'utilité
du commerce intérieur que pour le service des troupes du
Roy en paix et en guerre, demanderaient peu de discours pour prouver
de quelle importance il est pour le bien de l'Estat de s'appliquer
au rétablissement des haras, si l'exemple du passé
et le préjudice extrême que le royaume a souffert de
l'abandon où ils ont esté par le défaut de secours
nécessaires n'exigeaient de traiter la matière en
détail, et d'expliquer les règles que l'on doit suivre
dans une affaire de cette conséquence, la possibilité
dans l'exécution et les avantages qui en résulteront".
Le principe d'intervention
générale du gouvernement dans l'élevage du
cheval en France s'appuie sur la place essentielle du cheval dans
le fonctionnement de la société. Un rappel aux intendants
illustre ceci à l'évidence. "MM. les intendants conviendront
sans peine que rien n'est plus nécessaire au royaume que
l'élève de chevaux de toutes espèces pour ces
besoins et que dans les estats les mieux gouvernez, on les y compte
au nombre des premières richesses " (3).
Les gardes étalons obtenaient des grâces
spéciales attachées à leur qualité et
cela leur valait souvent l'envie des autres. Le Roi déclara
le 22 septembre 1709, que les intendants devaient remédier
autant que possible à ces divers inconvénients, réprimer
les abus et garantir ainsi à "l'Etat" les avantages qu'il
entendait retirer de toutes les concessions consenties. Le réglement
de 1717 en fait dépendre " nécessairement le succès,
l'heureuse influence des haras à la jouissance facile et
complète des privilèges. "
Il se développa très vite un réflexe
de prise de distance du peuple à l'égard de ces hommes
privilégiés. L'article 3 du règlement cherche
à prémunir les intendants contre l'esprit d'envie
qui porte à troubler et à inquiéter les garde-étalons
dans leurs privilèges "quoiqu'on leur démontre clairement
le bénéfice que leur rapporte l'establissement d'un
étalon dans une paroisse. Cette jalousie enfante toutes sortes
de mauvaises procédures contre les garde-étalons pour
les dégouter de leur employ et de les obliger à se
défaire de leurs chevaux, ce qui influe sur toute une élection
et empesche les autres habitants de se présenter, dans la
crainte de se voir exposez à de semblables vexations" (Article
3).
Le règlement précise que s'il faut
prévenir les garde-étalons des vexations, il faut
aussi prévenir les garde-étalons du " risque d'abuser
des avantages qui leur sont accordés " (article 3). On doit
faire entendre aux garde-étalons que dans les règlements,
"il n'est aucunement question d'innover rien de contraire à
la pleine jouissance de leur privilège, dans laquelle le
Roi veut qu'ils soient toujours maintenus". Le règlement
rappelle qu'il faut choisir pour garde-étalons des hommes
sérieusement disposés à remplir le but de l'institution.
Les juments couvertes par ces étalons étaient
souvent la seule valeur appartenant aux fermiers. Elles ne pouvaient
plus être saisies pour raison de recouvrement des deniers
royaux et dettes de communautés, puisqu'elles étaient
"annexées" aux étalons royaux (article 7). Cela représentait
un avantage pour ceux qui avaient une jument.
Dans cet ordre d'idée, le règlement
recommande très vivement "de ne se donner aucun mouvement
pour engager les gentilshommes à prendre les estalons du
Roy, par la peine où sont les commissaires de les assujettir aux
règlements des haras, outre le mauvais usage qu'ils font
d'ordinaire des chevaux de cette espèce, qu'ils emploient
le plus souvent à leur service particulier, négligeant
pour la plus part de laisser saillir les juments des environs" (article
9).
Le gentilhomme pour lequel est organisée
la production du cheval est donc explicitement exclu de l'organisation
de l'élevage à la base. L'exclusion des nobles de
l'élevage du cheval au cours du XVIIe est confirmée
avec force. Traditionnellement comme c'est encore le cas au XVIIIe
siècle, le gentilhomme ne chevauche que des mâles dont
seul l'exercice équestre démontre la valeur. Cette
condition est nécessaire pour la selection avant de confier
l'étalon à la reproduction. Ce détour équestre
n'est bien sûr plus indispensable en gérant l'élevage
avec les garde-étalons fermiers. La saillies des 30 à
35 juments que chaque étalon doit couvrir dans la saison
de monte devaient être la seule préoccupation du garde-étalon.
Il est intéressant de souligner cette distribution
des rôles entre producteurs et consommateurs que l'Etat impose inexorablement.
Tout se passe comme si l'Etat et son administration se voulaient
les concepteur et l'éleveur exclusifs du cheval qu'il prévoit
de mettre à la disposition de la noblesse.
Quel intérêt
le fermier, le laboureur, l'aubergiste et autre, choisi pour être
garde-étalons, pouvait-il attendre de l'amélioration
d'un animal dont, de leur vie, ils n'avaient ressenti aucune utilité
majeure : "on ne produit pas le cheval sans un intérêt
quelconque. Or le fermier, le laboureur, l'aubergiste, le cabaretier
que préférablement on transformait en garde-étalons,
quel intérêt pouvaient-ils prendre à l'amélioration
d'un animal dont ils n'avaient aucun besoin et qu'ils ne produisaient
ni ne tenaient à leur usage ? Cet intérêt ne
ressortant pas de la nature même des choses, c'est d'un ensemble
de dispositions réglementaires qu'on le fait surgir, mais
si mince, si incomplet nécessairement que de guerre lasse
et ne sachant plus où prendre de nouvelles faveurs pour les privilégiés
toujours plus exigeants, on arrive à des mesures de coercition
pleines de dureté même pour le temps" (4).
On se borna à remettre des étalons
à ceux-ci. On attacha à ces derniers une clientèle,
on protégea l'élevage en mettant les produits à
l'abri des saisies. Le règlement administratif décrit
de plus en plus pratiquement l'art et la manière de l'élève
et but principal des haras reste "l'establissement de bonnes espèces
de chevaux" (article 10).
On ne peut "souffrir d'estalons trop vieux, tarez
ou viciez de maux qui passent naturellement aux poulains qu'ils
engendrent". On recommande donc aux intendants d'éliminer
les "mauvais étalons" et les "médiocres" pour " qu'il
y en n'ait par la suite que de la plus belle tournure et sans défaut,
puisque l'establissement n'a d'autre objet que la perfection de
l'espèce ".
"La perfection de l'espèce" est la notion
utilisée au début du XVIIIème siècle
pour parler de ce que le XIXème nomma " l'amélioration
de la race ".
Le règlement de 1717, réajuste le
principe en vigueur sous Colbert qui consistait à " mélanger
les races entre elles " afin que " l'ordre naturel dépose
dans chaque animal nouveau les compléments de qualité
qui lui faisait défaut ".
Le croisement des espèces chevalines n'est
donc plus le mélange confus, disparate de toutes les espèces
entre elles, comme cela avait été déjà
conseillé et pratiqué. Le principe de "brassage" des
espèces est largement modifié au profit d'un ajustement
local et très précis des croisements.
2. La surveillance
les croisements
Pendant tout le XVIIIème siècle un
nouveau principe d'élevage général du cheval
est recherché mais cette démarche est pratiquement
très tergiversée. Des inspections très fréquentes
chez les garde-étalons devaient régulièrement
rappeler à l'ordre les contrevenants au nouveau règlement.
Le conseil édictant le règlement d'instruction, désire
cette surveillance rigide afin de ne pas revoir, comme il dit, se
perpétuer les abus qu'il craint trop et dont il sait très
bien qu'ils ne manqueront pas. Ainsi l'article 30 autorise la nomination
de garde-haras, préposés à la recherche et
à la constatation des délits et contraventions aux
règlements des haras.
Les autorités administratives craignent
de voir se développer la liberté de faire reproduire
des cavales avec des étalons non approuvés, c'est-à-dire
non royaux.
Pendant de nombreuses années, les propriétaires
reproduisaient pour leur propre compte et en faisant saillir des
étalons à eux avec des juments leur appartenant. Dans
cette situation l'ordonnance du Roi du 26 juin 1718 déclare
que "Sa Majesté ordonne que tous les particuliers propriétaires
de chevaux entiers, voulant faire saillir leurs propres juments
pour en avoir des poulains, seront tenus de prendre une permission
par écrit, et renouvelée toutes les fois..." Pour
les contrevenants, l'ordonnance prévoit "300 livres d'amende,
de la confiscation des chevaux et des juments surpris en contravention...".
Il est aussi stipulé que "les commissaires
doivent véritablement ménager l'esprit des garde-étalons"
(article 31) car, en toile de fond, le règlement rappelle
à nouveau que "les haras sont un bien commun pour tous les
sujets de l'estat, il faut pareillement que les provinces y participent
et l'on doit enfin revenir de l'erreur où l'on a esté, qu'il
suffirait de s'attacher aux seules provinces qui y sont plus propres,
puisque (...) elles ne pourraient jamais fournir le nombre et la
quantité suffisante pour tous les besoins du royaume" (article
32).
Une véritable police de l'élevage
s'instaure par la création des fonctions de "commissaires
inspecteurs", de "visiteurs" et de "garde-haras", dont les abus
se substituèrent à ceux des éleveurs improvisés
par l'administration colbertiste.
Les abus de la hiérarchie
administrative sont largement facilités par les dispositions
pénales du règlement de 1717 qui instaure un régime
de dénonciation permanent des exactions des éleveurs.
De surcroit, la dénonciation devient rémunératrice
pour le dénonciateur. La rigueur des dispositions est particulièrement
forte sur les infractions concernant la saillie proprement dite.
Ainsi "toute jument annexée à un étalon lui
devait la rétribution fixée pour le saut et ne pouvait
être livrée à un autre étalon approuvé
sans une autorisation spéciale du garde qui l'avait dans
sa clientèle attachée à son étalon.
Le fait de la saillie par un autre étalon entraînait
la confiscation de la jument et du produit ainsi obtenu. Une amende
de 50 livres, partagée entre le garde-étalon frustré
et le dénonciateur", indemnisait largement le premier, récompensait
et encourageait le second dans la recherche et la constatation de
délit (article 7) (5).
Les saillies sont vigoureusement observées car elles sont
le seul moment qui garantit l'accouplement de tel jument et de tel
étalon royal, couple choisi selon des critères rigoureux
de croisement.
Toujours dans la même
idée "aucun mâle âgé de plus d'un an ne
devait être envoyé au pâturage sans être
entravé diagonalement d'un pied de devant à un pied
de derrière. Dans ce cas, l'animal surpris était confisqué,
puis hongré aux dépens du propriétaire, condamné
en outre à 20 livres d'amende dont remise entière
était faite au dénonciateur" (6)?
Des critères devenus indispensables pour
être opposés aux autres pratiques. Dans ce dispositif
de 1717 l'intendant devient tout puissant pour solliciter les éleveurs
et châtier les contrefacteurs. Si dans un premier temps la
tâche essentielle des intendants fut "d'amorcer la pompe"
de la production du cheval, ils devinrent aussi les instigateurs
de critères de sélection esthétique très
sévères.
Toute la science consistait à accommoder
les " mérites " divers. On opposait une qualité à
un vice, une perfection à une défectuosité,
dans l'idée d'obtenir un produit final moyen. On disait alors
que tout animal portait en lui un germe susceptible d'être
passé à ses descendants.
Pichard fut inspecteur des
haras sous le Premier Empire, et eut des missions d'achat de chevaux
dans divers pays pour les écuries de l'Empereur et pour les
haras. Il avait été formé aux Grandes Ecuries
de Versailles et il raconte ses expériences dans un ouvrage
volumineux édité en 1812 "Manuel des haras ou système
de régénération des races de chevaux, applicable
à toutes les parties de l'Empire". Il dit que les mémoires
du temps (début XVIIIème) "n'apprennent rien sur la
science importante des accouplements. Une sorte de routine qui consistait
à choisir, avec assez de soin, la jument qui ressemblait
le plus au cheval, ou à mettre un étalon très
membré avec une jument qui pêchait par la finesse de
ses jambes, pour tâcher d'atténuer le vice de l'une
par la perfection contraire de l'autre, ou enfin en faisant saillir
une bête carrossière à une jument de selle,
ce qui produisait un poulain qui n'appartenait à aucune classe
en participant de toutes deux. Le tout était relatif à
la figure seulement, car on s'occupait peu ou point de ce qui constitue
le moral de cette utile créature" (7).
Très souvent, les
étalons approuvés se succédèrent dans
une même localité et ils provenaient d'une même
souche. Nés dans le pays ils avaient alors pris " la teinte
particulière au sol et au climat, ce que l'on nomme "habitat"
en un mot " (8). "L'indigent"
se recréait même avec l'action distributrice et combinatoire
de l'administration.
Le règlement de 1717, sévère,
réorganisa la production et obtint des résultats notables
dans le relèvement de l'élevage jusqu'à combler
la "pénurie" constatée à la fin du règne
de Louis XIV.
Les statistiques disponibles au commencement de
1789, comptaient 3239 étalons royaux et approuvés
pour un cheptel de 1500000 têtes. Les réglements autorisaient
35 juments par étalon, on obtint ainsi un chiffre avoisinant
115000 juments saillies.
Gayot estime à 55000
poulains le nombre de produits protégés par le règlement,
alors que 150000 poulains naissaient chaque année. Les chevaux
reconnus ne représentaient que le tiers des naissances au
maximum. "Il ne sera jamais possible de s'emparer administrativement
de la reproduction toute entière. Elle est une chose trop
considérable, un fait trop complexe pour qu'un règlement
puisse l'étreindre dans ses détails" (9).
On peut ajouter que le but de l'administration
du XVIIIe tel qu'il nous est révélé par le
règlement de 1717, était d'appréhender dans
un "grand élevage" l'ensemble des possibilités qui
y contribueraient. Le gouvernement n'a jamais pu y arriver et il
l'avait pressenti dans l'introduction générale des
instructions rédigées pour les intendants de province.
Le premier Haras Royal fut établi au Pin
dans l'Orne en 1714. Le second, fondé par la Marquise de
Pompadour à Pompadour en 1745, devint propriété
de la couronne en 1760. Quinze haras placés sous la surveillance
immédiate de l'administration générale des
haras quadrillèrent le territoire royal. Ce quadrillage s'est
fait grâce à la pénétration lente et
progressive des régions françaises et l'imposition des étalons
du roi sélectionnés et distribués en fonction
des contraintes locales et des impératifs du croisement.
Au XVIIIème siècle la localisation
des régions qui pratiquaient l'élevage des bêtes
bovines et des chevaux était rigoureusement déterminée
par les conditions générales de la production agricole.
Les agriculteurs se préoccupaient principalement de récolter
les grains nécessaires à l'alimentation de l'homme,
et dans ces conditions l'élevage était un "à
côté". L'élevage ne se faisait pas à l'écurie
et on n'enfermait les animaux que l'hiver, le moins longtemps possible.
L'isolement entre les régions, et l'état précaire
des moyens de communication, obligeaient les hommes à penser
avant tout à la nourriture des habitants. Dans cet ensemble,
un petit nombre de régions d'élevage pratique celui
du cheval et en règle générale, cet élevage
a peu de succès.
Les efforts de l'administration des haras pendant
le XVIIIème siècle n'ont pu implanter définitivement
dans plusieurs pays propices l'élevage du cheval (le Velay,
le Charolais, le Morvan) et se maintenir ailleurs (le Poitou et
l'Auvergne). Partout il subit des crises très fortes et décourageantes.
L'examen de situations régionales permet de comprendre certaines
raisons de ces difficultés notamment des raisons révélatrices
d'autres volontés politiques.
3. Le cas du
Limousin
Dans certaines régions, comme le Limousin,
l'institution des haras rencontre des conditions locales différentes
d'ailleurs.
Le Limousin a peu subi la
rigueur de la politique royale au XVIIème et a maintenu un
élevage florissant tenu par l'aristocratie locale. L'existence
ou l'absence de l'élevage du cheval s'expliquent par des
causes locales. Le Limousin était au XVIIIème siècle,
l'une des régions d'élevage les plus importantes.
Les chevaux de ce pays étaient, jusqu'à ce que les
chevaux anglais les supplantent à partir de 1775, les plus
estimés pour la selle. Ils étaient de petite taille,
fins, légers et de tournure élégante. Ils étaient
lents à croître et pour cette raison ils n'étaient
que tardivement montés. La région n'est pas particulièrement
favorable à l'élevage. L'alimentation était
peu abondante et assez maigre, car les poulains étaient abandonnés
à eux-mêmes la plus grande partie de l'année
dans des communaux et les jachères (10).
"Elevés
dans les Landes, ils auraient dû être rustiques; ils passaient
cependant pour les plus élégants de France " (11).
Cette élégance n'a été acquise par les
chevaux limousins qu'au XVIIIème siècle puisque l'intendant
de Limoges en 1681 pensait que les chevaux épais convenaient
beaucoup mieux que les fins aux juments limousines (12).
La
raison de cet élevage est due à une condition absente
dans tout le reste de la France. Ici les haras seigneuriaux restent
la règle. Ici les petits propriétaires ne produisaient
pas le cheval, ils lui préféraient l'élevage
des bovins, moins coûteux et moins aléatoires. La noblesse
continuant à produire ses chevaux, on comprend maintenant
que les chevaux limousins fussent distingués et supérieurs
à ceux des régions de même sol, comme la Bretagne."C'étaient
des chevaux de luxe produits par un élevage de luxe, par
des étalons de luxe" (13).
Ainsi il n'est pas étonnant que ces chevaux aient conservé
une certaine renommée : "sa distinction en faisait le cheval
des grands seigneurs" (14).
Le "Limousin" était ainsi acheté
pour les voyages, mais aussi pour le manège et la remonte
de la cavalerie légère. L'aristocratie avait su conserver
en Limousin des traditions d'élève sans avoir eu besoin
de théories grandiloquentes comme celles que véhiculait
l'administration des haras.
D'ailleurs le déclin de cette espèce
limousine date de l'intervention du haras de Pompadour dans la région
limousine dès 1763, lorsque celui-ci devint royal (1760)
et qu'il favorisa des "croisements inconsidérés".
Le Limousin est un exemple intéressant de
résistance au schéma général de l'élève
du cheval en France. Le cas du Limousin sera longuement débattu
par les tenants et les adversaires de l'intervention de l'Etat dans
l'élevage. Les théoriciens de l'intervention voyaient
d'un très mauvais oeil l'élevage mené, à
leurs yeux, par des empiriques. Ces "empiriques", membres de l'aristocratie,
localement très implantés, essayèrent de dénicher
une théorie d'élevage personnelle afin de répondre
à leurs critiques. Ils la trouvèrent dans l'art équestre.
Un de ces aristocrates, le comte de Lubersac, proposait que le directeur
des dépôts des haras soit obligatoirement un cavalier émérite
et soit de préférence " un gentilhomme écuyer
d'une probité non équivoque". Les chevaux dont il
aura la garde serviront en effet à l'éducation équestre
"de la jeune noblesse du voisinage".
Lubersac demande à
la noblesse de reprendre en main le cheval et son élevage.
Il n'a au fond pas d'autre théorie de l'élevage que
celle d'interpeler ses pairs à se remettre à l'équitation.
Autrement dit de maîtriser l'usage du cheval. Il fut entendu
par de nombreux éleveurs-cavaliers et dans d'autres régions.
Dans un mémoire édité en 1770 et réédité
en 1771 (15), un membre de
l'Académie royale d'Agriculture de Bretagne, Le Boucher de
Corsco, dit que "la perfection des races… peut faire revivre le
goût et l'exercice du cheval..."
L'auteur ne s'occupe que
de l'élevage en Bretagne où dit-il, les chevaux n'ont et
ne méritent aucune considération. Il se plaint que
l'on n'ait envoyé pour les améliorer, que des étalons
du Nord, Danois ou autres et demande que l'on emploie des Arabes,
Barbes, Turcs ou Espagnols. Pour lui, l'ensemble de la politique
de l'élevage devait promouvoir, par le perfectionnement des
races, l'exercice du cheval : "cette vue n'est peut-être pas
la moins importante l'administration politique est d'autant meilleure
qu'elle influe davantage sur la morale, et plus d'une raison porte
à croire que le goût et l'exercice du cheval influeraient
en bien sur les moeurs de la Nation" (16).
Si Lubersac explique que la noblesse doit reprendre
en main ses chevaux, symboles de sa puissance, Le Boucher de Grosco
propose qu'une race de chevaux soit créée pour régénérer
l'équitation et les moeurs de la Nation.
II - LA RECHERCHE
DU CHEVAL TYPE
Au début du XVIIIème siècle,
on ne voit pas se dégager un système "d'amélioration
bien arrêté". Toutes les "races" étaient croisées
entre elles, dans le but "d'améliorer l'espèce bien
sûr mais aussi pour composer de nouvelles qualités apparentes.
C'est la raison d'être
de cette administration : "on visait à une sorte de beauté
spéciale et de conviction qui s'arrêtait à la
surface et n'intéressait pas le fond" (17).
L'effort pour établir un critère
purement équestre de sélection comme le comte de Lubersac
le demandait est resté assez marginal dans l'ensemble de
l'élevage. Même si le langage cavalier reste utilisé
pour qualifier un choix de cheval.
Le comte de Brézé,
officier de cavalerie au service de la Sardaigne au XVIIIème,
explique comment il faut choisir un cheval. Si c'est " un cheval
de chasse, on examine s'il a de la légereté, des jarrets
et des jambes qui promettent de la ressource; si c'est un cheval
de manège, s'il a des reins souples et de beaux mouvements;
si un cheval de guerre s'il a un air robuste qui le fasse juger
capable de soutenir la fatigue, de la légèreté
et de la taille; si un cheval de maître, s'il est d'un poil
noble, s'il a une avant-main bien relevée et de beaux crins,
si des chevaux de carosse, s'ils ont du dessous, du poitrail et
de l'encolure. Si c'est un étalon, outre toutes les perfections
qu'il faut qui soient réunies en lui, on examine encore s'il
a une physionomie qui promette la vigueur, si un cheval de troupe,
il faut pour un cavalier un cheval fort épais, pour un Dragon,
un cheval qui ait de la légèreté, et pour un
Houzard, un cheval leste et de beaucoup d'haleine. (...) après
ce court examen, on monte le cheval, pour connaître s'il a
de la force et s'il n'est point hargneux, rétif ou ombrageux
(...) " (18).
Le marquis de Brancas, l'organisateur du règlement
de 1717, déclare à un inspecteur des haras de Haute
Auvergne qu' " il aime le beau plus que personne ". Cet aristocrate
écrivait à l'intendant Chauvelin le 4 juillet 1727,
que les intérêts des éleveurs du Boulonnais
étaient secondaires puisqu'il connaissait très bien
leurs chevaux "ce sont de bons limoniers, et de bons chevaux de
charette et de charrue, avec beaucoup de poil aux jambes, de sorte
qu'on en saurait tirer un cheval de carrosse ni de troupe un peu
propre".
Claude
Bourgelat
Claude Bourgelat sera le grand théoricien
de la beauté du cheval dans la deuxième moitié
du XVIIIème siècle.
Bourgelat,
écuyer, fondateur de l'Académie d'Equitation à
Lyon, où la jeune noblesse affluait de toutes parts, créa
"l'Ecole pour les maladies des bestiaux" le 1er janvier 1762. Cette
école prit le nom de l'Ecole royale vétérinaire
en 1764. Bertin le nomma inspecteur général de toutes
les écoles vétérinaires établies où
à établir dans le Royaume et surtout il le nomma commissaire
général des haras (19).
Les deux hommes étaient très proches. Le mouvement
d'idées qu'exprimera Bourgelat était largement répandu
dans les sphères dirigeantes et chez les intendants surtout
(20). Ainsi l'intendant de
Bretagne, Case de la Brove, voit les chevaux de cette région
sous les couleurs les plus négatives; "ils sont mal tournés,
disproportionnés dans leurs parties, taillés en taureaux".
L'intendant du Hainaut, Taboureau déclare que les paysans
"ne s'attachent à aucune des parties qui caractérisent
les beaux chevaux". Si on trouve les mêmes propos chez les
intendants du Comtois ou Bressans, tous, cependant reconnaissent
que malgré l'absence de beauté, ces animaux "sont
sains, vigoureux, d'un entretien aisé" et surtout qu'ils
se vendent fort bien.
En conclusion, pour ces intendants, il y a de bons
chevaux, mais point de beaux. Mais pour ces fins connaisseurs de
chevaux, comment obtenir un beau cheval ?
"Pour avoir de beaux chevaux,
il faut nécessairement croiser les juments nationales avec
les chevaux étrangers ou les femelles de nos départements
méridionaux avec les mâles des départements
septentrionaux. Plus la température des climats où les étalons
et les cavales ont pris naissance sera éloignée, plus
les formes seront parfaites, dans l'union et le mariage des deux
animaux de régions différentes, les départs
se compenseront en quelque sorte, surtout si l'on oppose les climats..,
de là on a reconnu la nécessité de mêler
les races et de les renouveler souvent par des races étrangères
" (21).
Les principes de Bourgelat
sont donc le croisement continu des races en opposant les climats,
et la compensation des qualités et des défauts, en
réparant par les perfections du père et les imperfections
de la mère et inversement. Les perfections et imperfections
sont déterminées pour Bourgelat à partir d'une
étude géométrique des proportions du beau cheval.
Bourgelat condamne l'empirisme et il lui semble désormais
possible d'appliquer en toute certitude les lois relatives à
la reproduction "la taille du cheval de selle doit être de
quatre pieds huit pouces, celle du cheval de carrosse doit être
de cinq pieds et au delà, les beaux chevaux doivent être
noirs ou de toutes nuances de bai" (22).
Bourgelat néglige les liens entre l'élevage
du cheval et le mouvement agronomique; il aborde la politique de
l'élevage comme un écuyer. Cette mentalité
s'avère trop systématique, trop dogmatique et par
trop cavalière. Bourgelat dit dans cette optique cavalière
que quatre qualités font le cheval parfait : la force, la
légèreté, le courage et le jugement, quatre
autres le font défectueux la faiblesse, la pesanteur, le
défaut de courage et la paresse. Bourgelat était un
homme cassant et autoritaire, et il s'ingéniait à
démontrer aux inspecteurs des haras qui s'avisaient de le
contredire, la supériorité de ses théories.
Pour cela, ces inspecteurs furent obligés de suivre les cours
dispensés à 1'Ecole vétérinaire de Maisons
Alfort. Cette obligation contribua à étendre le système
de Bourgelat. Ainsi les promus, forts d'un diplôme, vont se faire
les chantres du croisement des espèces et de l'application
des règlements.
L'application de la bonne théorie, l'avénement
de l'école et des diplômes produisent leurs premiers méfaits.
Les habitants des "quatre Vallées" dans les Pyrénées
se plaignent de ce que leur inspecteur dédaigne " souverainement
les connaissances des habitants dont plusieurs savaient par expérience
ce que lui ne connaissait que par une espèce de théorie
qui n'est point applicable à tous les pays indistinctement,
a fourni des étalons dont la race n'a pas été
assortie à celle du pays ".
En revanche, l'inspecteur Grand Pré, dans
le Boulonnais, réplique "comment a-t-on pu demander conseil
à des gens qui ne décident rien dans leur village
qu'au cabaret avec le vin et l'eau de vie ?" Cet inspecteur est
convaincu de la nécessité d'appliquer les règlements
et n'a que mépris pour la "routine" des paysans. Il applique
les textes à la lettre, soulève contre lui l'hostilité
des populations, à tel point qu'il est obligé de faire
appel à la maréchaussée pour procéder
aux revues des juments.
D'autres inspecteurs se refusent à ce dogmatisme.
M. de Fontenay, inspecteur des haras dans la Généralité
d'Orléans, s'oppose aux idées de Bourgelat. Il récuse
absolument le système de croisement des espèces, comme
Lubersac s 'y opposait, en disant que cela ne faisait que produire
des "monstres". M. de Fontenay ne croit pas aux vertus de l'application
stricte de la réglementation. M.de Fontenay ne fut pas formé
à Maison Alfort... L'opposition est de courte durée.
Plus tard, son successeur lui diplômé croit que " l'espèce
est dégénérée... on doit en attribuer
la cause au défaut du croisement des races ". Contrairement
à. M. de Fontenay, il voudrait changer les étalons
dont la plupart sont âgés de 10 à 20 ans "d'où
il est résu1té plusieurs répétitions
de consanguinité aussi pernicieuse dans l'espèce des
chevaux qu'elle le serait dans celle des hommes".
L'application des idées
de Bourgelat aboutissait à nier et à combattre l'existence
des espèces locales pour privilégier un "type idéal".
On affirmait la beauté d'un cheval lorsque l'on reconnaissait
dans l'animal divers traits physiques symptomatiques de "race" de
chevaux étrangers à la région. La poursuite
de la perfection dans les formes, l'espèce de beauté
dogmatique s'arrêtait à la "surface" et n'allait pas
au "fond" comme le dit Gayot (23).
Cette politique était directement issue de cette volonté
de l'anobli d'exposer son corps et celui de ses chevaux.
En même temps que l'on commence à
percevoir l'espace national comme un territoire d'élevage,
s'échaffaude une administration sévère et hiérarchisée.
L'ami de Bourgelat, Bertin, sera directeur des haras de 1764 à
1780 et il se préoccupa de modifier les structures agraires
qui lui semblaient s'opposer aux progrès de l'élevage.
Bertin renverse le raisonnement et au lieu de penser cheval, pense
l'espace qui le voit naître et l'élève. Par
exemple, en 1764, il appuie très fortement le projet de l'intendant
Calomne dans les "Trois Evêchés" qui vise à
supprimer la vaine pature et le parcours en liberté des animaux.
Bertin procède ensuite à une enquête auprès
des intendants et des inspecteurs des haras. Il lui fallait savoir
à quel endroit de la chaine de l'élevage il fallait
intervenir pour que le gouvernement obtienne le plus grand effet
multiplicateur. Malgré cette politique audacieuse, Bertin
reste prisonnier d'une conception classique de la production du
cheval : seul le cheval "léger" compte. Il favorise la production
du cheval de selle et de carrosse et condamne le cheval de trait
au moment même où les physiocrates croient et voient en ce
cheval un facteur de progrès agricole.
A la veille de la Révolution, on disait,
ça et là, que "le cheval est passé de mode et que
les bottes sont devenues indécence". Néanmoins il
restait le domaine réservé de l'aristocratie, comme
en témoigne la nomination d'une des plus grandes familles
de France à la tête des haras. Sous l'administration
des Polignac (1780-1790), la volonté de faire obéir
une immense administration est très nette. Le marquis de
Polignac réorganisa son administration en 1780 en annonçant
l'imminente réalisation d'un plan général et
systématique de réforme pour l'ensemble du pays. Son
fils créé duc, ayant reçu les mêmes charges,
reprend cette idée de l'action administrative. Mais en conclusion,
malgré leurs déclarations, le père et le fils
ne firent que "bureaucratiser" encore plus leur administration.
Les inspecteurs des haras, qui avaient pendant
longtemps été jaloux de leur indépendance,
laminés une première fois sous Bourgelat, puis dépossédés
de leur compétence d'expert de l'art de bien élever
avec Bertin, vont être transformés en un corps de fonctionnaires
hiérarchisés et dociles. Par exemple, leur commission
ne leur sera pas distribuée par le Roi, mais par le directeur
des haras. Polignac voulut, dès le départ, avoir la
haute main sur les nominations. Puis un corps nouveau d'inspecteurs
visiteurs les surveillera dans l'application qu'ils feront des règles
et de la doctrine. Les inspecteurs visiteurs (3 et puis 4 postes
en 1784) seront chargés de l'achat des étalons. Dorénavant
ils seront aussi astreints au port d'un uniforme. Leur correspondance
avec l'administration centrale devra se faire sur un modèle
unique et chaque question devra être traitée séparément
et numérotée.
III - L'ADMINISTRATION
DOIT-ELLE CHOISIR L'ARABE OU L'ANGLAIS ?
Dans la situation générale assez
confuse d'une définition d'une politique unique de production
de chevaux faute d'un principe universellement accepté il
apparaît d'autre théorie de l'élevage qui bien
que marginale au début vont avoir un écho de plus
en plus grand. Les futures théories des races de chevaux
pourront emprunter ces nouvelles conceptions de l'organisation de
l'élevage dont la fonction militaire.
1. Le plan
de Préseau de Dompierre
Préseau de Dompierre, officier de cavalerie,
né en 1730, eut une longue carrière qui le conduira
à être inspecteur général de la maréchaussée
avec rang de Mestre de camp de cavalerie. Il se consacrera pendant
sa retraite en 1784, à régir deux haras, l'un privé
et l'autre public dans le Haînaut.
De l'avis de plusieurs auteurs du XIXème
siècle ou du XXème siècle, il fut en avance
sur son temps en préconisant des mesures jugées pour
l'époque vexatoires, ruineuses, mais à coup sûr ingénieuses.
Cependant les idées de Préseau de Dompierre permettent
de présenter certaines facettes de la politique de l'élevage
à la veille de la Révolution.
Si personne en France ne
les reprit, un exemplaire de l'ouvrage de Préseau de Dompierre
fut lu par Frédéric Guillaume, Roi de Prusse qui adopta
le plan présenté pour l'organisation de ses haras
(24). Préseau de Dompierre
se livra à une critique serrée des structures agraires
qui interdisaient selon lui, tous progrès même si les
paysans étaient assez riches pour conduire l'élevage
dans les règles.
L'auteur écrit "les
haras objets si essentiels dans une monarchie aussi vaste que la
nôtre, ne doivent former qu'une seule machine dont tous les ressorts
se répondent entre eux, ne reçoivent qu'une impulsion forte
et unique et ne puissent agir les uns sans les autres, la jument
du pied des Pyrénées ne doit point être saillie
sans que la copulation ait un rapport direct et essentiel avec la
copulation de celle des bords de la Manche. On le répète,
et on ne saurait trop le redire, c'est en grand que doit être
traité un grand objet dans un grand Etat" (25).
Préseau de Dompierre exprime clairement
dans cette citation la conception globale qui sera à la base
du fonctionnement de ce que le XIXème et le XXème
appelleront un "système de ressorts" où "en perfectionnant
un individu on perfectionne l'espèce entière". Il
illustre ses propos par le schéma suivant, calqué
sur l'hexagone du territoire français, où il propose une véritable
planification de l'élevage du cheval avec toute une dynamique
de fonctionnement.
Pour cet éleveur,
on doit créer des "haras de pépinière a partir
d'étalons "arabes purs". Ceux-ci seront destinés à
produire des jeunes mâles aux différentes "races" de
juments existantes les premiers seront établis dans les provinces
les plus méridionales de la France. De l'accouplement de
chevaux arabes de race avec les juments autochtones on tirera de
jeunes chevaux un peu plus élevés que leurs pères,
assortis à leur tour à des cavales plus étoffées,
ils donneront naissance à des chevaux plus élevés
et ainsi de suite par degré en remontant vers le Nord (26).
Préseau de Dompierre
pense même, et l'on voit que c'est vraiment nouveau dans ce
siècle où le mâle avait encore la primeur, que la formation
des races de poulinières est possible avec les juments qui
existent à présent dans le royaume (27).
Voici le descriptif de la France organisée
par Préseau de Dompierre pour réussir l'élevage
des chevaux dont le royaume a besoin. (voir la représentation
cartographique de la France)
Ce premier tabou ébranlé, Préseau
de Dompierre entend, par croisement, non plus "l'exogamie" permanente
des pratiques antérieures, mais le recours périodique
à un "germe primitif", c'est-à-dire un principe améliorateur
qui est pour lui le "sang arabe". Le sang arabe est ainsi dans son
système ce qui vainc l'influence négative du milieu
par un apport d'énergie régulier et systématique.
Avec ces principes et avec la mécanique
administrative qu'il propose, il n'y a plus pour lui de problème
d'appareillement des couples et l'influence du climat peut être
combattue.
2. L'arabe
ou l'anglais
Les partisans de l'administration de l'élevage
du cheval et ceux qui s'y opposent vont choisir dès la fin
du XVIIIème siècle leur idéal de chevaux, "L'Arabe"
et "l'Anglais" sont ces deux races sur lesquelles se formeront des
clans.
Préseau de Dompierre
se déclare en 1788 en faveur de "l'Arabe" : "on vient de
prouver qu'il n'existe dans l'univers entier qu'une seule espèce
pure, le cheval arabe ; que ce germe précieux est unique,
que les différences qui se trouvent entre le cheval arabe
et certaines races, soit pour la taille, soit pour d'autres qualités,
sont l'ouvrage ou de l'homme ou de la température du climat
et de la diversité des nourritures; il en résulte
que les meilleurs chevaux, dans quelque genre que ce soit, seront
toujours ceux qui auront reçu dans leurs veines une plus grande
quantité de sang arabe parce qu'il est, on ne saurait trop
le répéter, le cheval de l'univers, le cheval de la
nature" (28).
Depuis quelques temps, ce cheval "oriental" était
à la mode, il le sera encore plus pendant le XIXème
siècle.
Il fut en concurrence très
forte avec le cheval anglais dont la race fut créée
au XVIIème et au XVIIIème. Préseau de Dompierre,
tout en étant un homme prévoyant, restait pris dans
la conception du rapport aristocratique au cheval qui avait déjà
incliné le comte de Lubersac à affirmer sa théorie
de sélection par la valeur équestre de l'animal. Voici
comment Préseau de Dompierre voit les choses en cette fin
de siècle : " la multiplication et la commodité des
chaussées en facilitant l'usage des voitures, ont diminué
l'exercice du cheval, ce qui a fait perdre au cheval de selle le
plus parfait, le plus difficile comme le plus cher à élever
beaucoup de son mérite. Si l'homme aisé sort de chez
lui, même pour n'aller que dans l'intérieur de la ville
enfermé dans une boite somptueuse et commode, il est à
l'abri du froid, du chaud et des autres intempéries de l'air.
L'animal qui le conduit, éloigné, isolé de
son maître n'a de rapport qu'à son luxe, à sa
vanité et à sa noblesse. L'homme qui va à cheval,
uni en quelque façon à l'animal sur lequel il est monté,
éprouve au contraire et partage, à chacun de ses mouvements
l'agrément ou le déplaisir nécessairement attachés
aux qualités bonnes ou mauvaises de sa monture il est plus
à portée d'en sentir le mérite ou les défauts,
d'étendre son usage et ses services, et par conséquent,
de concevoir par la connaissance de son prix et de ses avantages
le désir de la perfectionner et de la multiplier " (29).
Préseau de Dompierre vante les mérites
des éleveurs cavaliers et dénonce ceux qui ne le sont
pas en sous-entendant dans ces derniers tous ceux qui ne reconnaissent
pas le cheval arabe comme le cheval le plus pur.
Ce genre de pensée avait prédisposé
l'administration à émettre comme critère de
sélection, un ensemble de principes esthétiques empruntés
à une beauté parfaite que l'Arabe, l'étalon
oriental, incarnait.
Le cheval Anglais provoquait beaucoup de réserve
chez les hommes de cheval de ce moment car la trop grande légèreté
de sa forme rappelait trop la fragilité. Il fallut alors
que ce cheval fut présenté à tous, non sous
l'angle esthétique, mais plutôt sous l'aspect de son efficacité
: la vitesse. La vitesse, d'ailleurs, n'était pas un bon
critère pour tout le monde au XVIIIème siècle.
Ce n'est que très lentement qu'elle deviendra un élément
de sélection des chevaux. Cependant il est intéressant
de constater que les partisans du cheval Anglais veulent que ce
critère supplante celui purement classique qu'est l'équitation.
Le changement se fera au cours du XIXème siècle.
Louis-Léon Félicité de Brancas,
comte de Lauragnais (1733-1824) fut célèbre pour son
esprit frondeur et ses réparties. Il fut officier, puis quitta
l'armée. Il avait été exilé sous Louis
XV quelque temps en Angleterre. Il y fréquenta les courses
et en rapporta le goût en France. Dans un mémoire publié
en 1778, il défend le cheval Anglais, et aussi l'utilité
des courses.
"Si le premier moyen pour
avoir des chevaux est d'encourager la multiplication, le second
est d'établir des courses dans toutes les provinces et de
n'admettre pour étalons dans ces provinces que les chevaux
qui ont couru, parce que les courses sont le seul, l'unique, l'infaillible
moyen d'apprécier le cheval, et par conséquent, de
faire cesser ce commerce de fripons et de dupes qui achètent
des chevaux sur l'horoscope qu'ils en tirent, parce que si le meilleur
cheval est celui qui fera la meilleure production, ce meilleur ne
sera pas celui qui aura le plus de beauté, de convention,
mais qui parcourra le plus vite l'espace donné en portant
un plus grand poids" (30).
Plus loin, il reprend :
"Personne ,dit-on, n'a besoin d'avoir un cheval de course, j'en
conviens, mais l'Etat a un besoin indispensable d'avoir des coursiers,
pour produire, avec des juments qui auront plus ou moins de sang,
des chevaux de toutes espèces. Aussi, dit-on encore, le Roi
fait depuis longtemps de grandes dépenses pour avoir des
chevaux arabes, les meilleurs de la terre, et qui sont les pères
de vos chevaux anglais; si on demande aux patriotes pourquoi on
n'a pas en France de leur production comme en Angleterre, ils répondent
à cela que le Roi et l'Etat ne dépensent pas assez
d'argent; et si on leur fait remarquer que c'est précisément
en Angleterre, où il y a tant de chevaux, qu'il n'en coûte au Roi
et à l'Etat que 22 prix pour les courses dans les différentes
Provinces d'Angleterre ils conviennent alors humblement que les
particuliers en Angleterre sont beaucoup plus riches qu'en France
cela est vrai et scandaleusement vrai. Mais une partie des dépenses
que le système des haras coûte à l'Etat et au Roi,
distribué dans les Provinces, en prix pour courses, déterminerait
infailliblement un grand nombre de propriétaires à
élever des chevaux " (31).
Le comte de Lauraguais illustre bien le renversement
d'état d'esprit que l'aristocratie fera dans sa grande majorité,
lors de son exil d'un quart de siècle entre 1789 et 1815.
Pour lui, l'art équestre n'étant plus un critère,
il faut instaurer les courses comme principe de sélection.
C'est donc à la Restauration que l'idée
fera son chemin sur tout le territoire. A ce moment d'ailleurs,
le comte de Lauragais sera nommé par Louis XVIII pair de
France avec le titre de duc de Brancas. Au XVIIIe siècle
l'administration de l'élevage du cheval ne choisira pas entre
ces deux races de chevaux. Il faudra attendre certains développements
de la vie politique française pour que d'une part l'Etat refuse
toutes utilisations du cheval anglais au profit de l'arabe et d'autre
part que les tenants du libéralisme fassent du pur sang anglais
leur idole de perfection.
3. La fin des
haras
En 1788, Préseau de Dompierre témoigne
d'une situation peu brillante. Il dénombrait à plus
de 13000 le nombre de chevaux achetés encore par le gouvernement
à l'étranger. Ce fait aurait dû suffire comme argument
à n'importe quel politicien qui se serait interrogé
sur la vie économique de la France, pour constater qu'il
fallait protéger la production du cheval français et pour
cela mieux l'organiser. Ce ne fut pas le cas en 1789.
La destruction des établissements de haras
fut prononcée par le décret du 29 janvier 1790 et
la loi du 13 novembre 1790, ordonna la vente immédiate de
tous les étalons qui appartenaient au Roi qu'ils fussent
en dépôt de l'administration ou chez les particuliers.
Le Moniteur Universel rend compte de la séance
du vendredi 29 janvier 1790, à l'Assemblée constituante."Le
rapporteur propose : l'abolition du régime prohibitif des
haras, la suppression des dépenses publiques relatives à
ces établissements, que les étalons et les établissements
autres que ceux qui se trouvent dans le domaine du Roi, soient mis
à la disposition des assemblées administratives".
Pour les révolutionnaires, les étalons
du Roi devaient disparaître avec le despotisme. S'il est facile
de comprendre ce premier réflexe il faut se garder de le
généraliser. En effet certains trouvaient enfin la
bonne occasion pour détruire l'édifice administratif
si laborieusement organisé. Parmi les orateurs, M. le vicomte
de Noailles pense que le " meilleur moyen d'avoir de bons chevaux
est de n'avoir point de haras. Je suis donc d'avis d'abolir les
haras ". D'autres, comme le vicomte de Mirabeau demandent l'ajournement
de cette question, qu'ils trouvent d'une grande importance et qu'il
faut traiter avec maturité.
L'abolition des haras fut le fait des hommes de
finance. Le comité instigateur agit avec précipitation
et isolément sans consulter le comité de la guerre,
ni celui de l'agriculture.
Cette loi se présenta comme une loi de finances,
et la proposition de Mirabeau fut rejetée. Ainsi comme le
désirait le vicomte de Noailles "chaque particulier se trouva
en face de son droit naturel d'élever des chevaux quand et
comme il lui plairait. Or les particuliers comprenant bien que dans
les circonstances d'abandon et d'isolement où le droit les plaçait,
ils n'avaient aucun intérêt direct à produire
le cheval, n'eurent garde d'y toucher et se montrèrent plus
soucieux des besoins du pays que ceux-là qui avaient eu pour
mission spéciale d'organiser les moyens de les remplir à
la satisfaction de tous. Ils ne furent pas, eux, plus royalistes
que le Roi, ils cessèrent tout simplement".
Les temps n'étaient
pas favorables à l'élevage. "Pendant la Révolution,
des dilapidations, des réquisitions frappant à tort
et à travers sur le cheval de luxe comme sur celui employé
aux travaux de l'agriculture, sur l'étalon comme sur la poulinière,
des guerres opiniâtres dont le théâtre est pendant
longtemps sur le sol français, aucune sécurité, aucune
confiance, par conséquent ruine de toutes les industries
ou stagnation complète dans les entreprises commerciales
et agricoles; les grandes fortunes détruites, l'émigration
entraînant sur le sol étranger les restes d'une noblesse
proscrite, décimée et ruinée, sont les suites
de la Révolution et le complément de la destruction
de tout ce qui a rapport à la production et à l'amélioration
du cheval" (32).
Le
Préfet de l'Orne dira à propos de la suppression des
haras de Janvier 1790, que cette faute énorme "fit sourire
l'Angleterre" (33) . Le Préfet
de Corrèze parle, lui, de "l'esprit de vertige" qui fit supprimer
le haras de Pompadour (34).
La Convention nationale se rendit compte tardivement de l'irresponsabilité
de cette décision contraire aux intérêts du
pays. Il faut attendre le 2 Germinal An III pour qu'une loi porte
l'établissement provisoire de " dépôts d'étalon
pour élever l'espèce des chevaux ".
La suppression des haras
a eu pour effet de disperser les 1116 étalons nationaux qu'entretenait
la royauté. Ces étalons d'élite furent vendus
à vil prix. Les plus beaux furent achetés par les
Anglais qui s'empressèrent de les acquérir. Les cultivateurs
propriétaires des 2124 étalons "approuvés se
découragèrent en ne recevant plus de gratifications
pour leur entretien. Ils les vendirent rapidement ou les transformèrent
en chevaux hongres. Effrayés par la rigueur avec laquelle
la Convention procède à la réquisition des
chevaux de selle et des chevaux de trait en 1793 et au début
de 1794, de nombreux propriétaires s'appliquèrent
à ne garder pour leurs travaux que des chevaux tarés.
On les vit rejeter des chevaux de choix et n'accepter que ceux de
rebut. Par manque de chevaux adultes, des agriculteurs firent saillir
des poulains et faire porter des pouliches longtemps avant que les
uns et les autres eussent acquis les forces nécessaires et
le développement dont ils avaient besoin (35).
ANNEXES DU CHAPITRE
V : LE CHEVAL par Buffon
Ordre des pachydermes, famille des solipèdes,
genre Cheval,. (Cuvier.)
La plus noble conquête que l'homme ait jamais
faite est celle de ce fier et fougueux animal, qui partage avec
lui les fatigues de la guerre et la gloire des combats; aussi intrépide
que son maître, le cheval voit le péril et l'affronte;
il se fait au bruit des armes, il l'aime, il le cherche et s'anime
de la même ardeur; il partage aussi ses plaisirs; à
la chasse, aux tournois, à la course, il brille, il étincelle;
mais docile autant que courageux, il ne se laisse point emporter
à son feu, il sait réprimer ses mouvements; non seulement
il fléchit sous la main de celui qui le guide, mais il semble
consulter ses désirs, et obéissant toujours aux impressions
qu'il en reçoit, il se précipite, se modère ou s'arrête,
et n'agit que pour y satisfaire; c'est une créature qui renonce
à son être pour nexister que par la volonté
d'un autre, qui sait même la prévenir; qui, par la
promptitude et la précision de ses mouvements, l'exprime
et l'exécute; qui sent autant qu'on le désire, et
ne rend qu'autant qu'on veut; qui, se livrant sans réserve,
ne se refuse à rien, sert de toutes ses forces, s'excède
et même meurt pour mieux obéir.
Monsieur de Buffon 1707-1788, Extrait des oeuvres
complètes, édition de MDCCCXLII
Cette annexe présente l'explication par
Préseau de Dompierre de son programme d'élevage :
EXPLICATION
DU TABLEAU GENEALOGIQUE DU HARAS DE LA FRANCE
Les cinq Haras de pépinière formeront
trois cents Educations secondaires. Les trois cents Educations secondaires
armeront dix mille Haras du royaume.
A - Haras de pépinière du premier
ordre, sité entre le 42e et le 43e degré de latitude
septentrionale, et le 17e et le 23e degré de longitude.
B - Haras de pépinière du second
ordre, sité entre le 44e et le 45e degré de latitude
septentrionale, et le 17e et le 23e degré de longitude.
C - Haras de pépinière du troisième
ordre,situé entre le 46e et le 47e degré de latitude
septentrionale, et le 17e et le 23e degré de longitude.
D - Haras de pépinière du quatrième
ordre, situé entre le 48e et le 49edegré de latitude
septentrionale, et le 17e et le 23e degré de longitude.
E - Haras de pépinière du cinquième
ordre, situé entre le 50eme et le 51e degré, de latitude
septentrionale, et le 17e et le 23e degré de longitude.
N° : Ligne qui désigne l'entrée
des gènes mâles du haras de pépinière
du premier ordre, dans le haras de pépinière du second
ordre.
1 - Ligne qui désigne l'entrée des
gènes mâles du haras de pépinière du
second ordre dans le haras de pépinière du troisième
ordre.
3 - Ligne qui désigne l'entrée des
gènes mâles du haras de pépinière du
troisième ordre, dans le haras de pépinière
du quatrième ordre.
4 - Ligne qui désigne l'entrée des
gènes mâles du haras de pépinière du
quatrième ordre, dans le haras de pépinière
du cinquième ordre.
F - Educations secondaires dépendantes
du haras de pépinière du premier ordre, auxquelles
il fournira des étalons.
G - Educations secondaires dépendantes
du haras de pépinière du second ordre, auxquelles
il fournira des étalons.
H - Educations secondaires dépendantes
du haras, de pépinière du troisième ordre,
auxquelles il fournira des étalons.
J - Educations secondaires dépendantes
du haras de pépinière du quatrième ordre ,
auxquelles il fournira des étalons.
K - Education secondaires dépendantes du
haras de pépinière du cinquième ordre, auxquelles
il fournira des étalons.
Les petits points semblables à des notes
de musique désignent, les haras du royaume dépendant
de chaque éducation secondaire, et les étalons que
chacune de ces éducations secondaires leur fourniront.
Il faut observer que les haras de pépinière
vont du midi au nord, que les éducations secondaires et les
haras du royaume suivent tous également la même direction.
L'affaiblissement de la couleur rouge, en passant
par chaque haras de pépinière, indique la diminution
de perfection du sang qui sortira de chacun de ces haras, à
mesure qu'il s'éloignera de la sourçe primitive. La couleur
de l'éducation secondaire de chaque haras de pépinière
est aussi légérement affaiblie, ainsi que celle du
haras du royaume pour la même raison.
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